Installation des jeunes médecins : ce que change (vraiment) la PPL Garot
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Article N°28638

Installation des jeunes médecins : ce que change (vraiment) la PPL Garot

Installation des jeunes médecins : ce que change (vraiment) la PPL Garot

Alors que la question des déserts médicaux s’installe durablement dans le débat public, la proposition de loi portée par Guillaume Garot, actuellement en discussion à l’Assemblée nationale, entend y répondre par plusieurs mesures. Pour les jeunes médecins en début de carrière, les implications sont majeures. 


Décryptage

1)  Une ambition clairement affichée : réguler l’installation des médecins

La PPL Garot repose sur une idée centrale : rééquilibrer l’offre de soins sur le territoire en régulant l’installation des médecins libéraux, qui seraient aujourd’hui concentrés dans certaines zones sur-dotées. Concrètement, l’article 1er du texte prévoit que dans ces zones, un médecin ne pourra s’installer que si un autre y cesse son activité. Une sorte de « numerus clausus territorial » d’installation. 

Cela concernerait seulement 13 % du territoire nous dit-on. Mais cela signifie qu’aucun médecin supplémentaire ne pourra s’installer dans ces territoires, même si la demande de soins augmente dans les prochaines années, même si de nouveaux habitants s’y installent… avec le risque d’entrainer une dégradation de l’accès aux soins dans les zones correctement dotées aujourd’hui.

Nombre moyen d'actes généralistes par bénéficiaire en 2023
une autre manière de repérer les difficultés d’accès aux soins

 

Impact pour les jeunes médecins :

  • Perte de la liberté de choix du lieu d’installation dans certains territoires
  • Risque d’engorgement dans les zones où les opportunités de remplacement ou d’installation deviennent limitées
  • Perte de la liberté d’organisation : choix de son emploi du temps, du nombre de patients, du rythme de travail, de la possibilité de s’installer seul ou en équipe (MSP, centres de santé…)
  • Perte de l’autonomie de décision médicale et entrepreneuriale : maîtrise complète de ses actes, de sa pratique, de sa relation au patient, choix de l’offre de soins, de la spécialisation, du matériel utilisé…

2) Une obligation de garde : vers une permanence des soins ambulatoires (PDSA) universelle

La PPL Garot introduit une autre disposition sensible et notable : la participation obligatoire à la permanence des soins ambulatoires (PDSA). Jusqu’ici fondée sur le volontariat, cette participation deviendrait un devoir pour tout médecin libéral, mais aussi salarié, en ville comme à la campagne.

Pourtant, selon le Conseil National de l'Ordre des Médecins (CNOM), en 2023, 97 % des territoires étaient déjà couverts le week-end, et 96 % en soirée, grâce à l'engagement volontaire des praticiens.

Impact pour les jeunes médecins :

  • Intégration dès l’installation à un système de gardes souvent mal réparti
  • Tensions potentielles avec les contraintes de vie personnelle et l’installation progressive
  • Une charge de travail accrue sans accompagnement systématique et soutien ciblé aux jeunes installés

3) Une compensation fiscale qui interroge

Les partisans du texte mettent en avant la défiscalisation des rémunérations perçues pour la PDSA. Or, cette disposition existe déjà (article 151 ter du CGI) pour les médecins en zone sous-dotée. Il ne s’agit donc pas d’une avancée nouvelle, mais d’un rappel d’un dispositif existant, souvent difficile à activer dans la pratique.

L’impact réel pour les jeunes médecins :

Un habillage incitatif pour une contrainte forte, sans réels moyens complémentaires.

4) Et l’assistanat territorial dans tout ça ?

Une alternative est portée par certains acteurs du terrain : l’assistanat territorial volontaire. Inspiré de modèles des États-Unis et du Canada, il permettrait à un jeune médecin de s’installer temporairement dans une zone sous-dotée, avec encadrement et incitations à la clé, avant un choix définitif. 

L’assistanat territorial peut être une solution, mais certainement pas en « mode bricolage ». Il exige un cadre structuré, une intégration réelle dans le parcours professionnel et un investissement sur les terrains de stage et la formation des maîtres de stage.

En conclusion

La PPL Garot marque une rupture avec la logique de liberté d’installation. Si elle souhaite répondre à un besoin réel de rééquilibrage territorial, elle soulève en réalité de fortes inquiétudes chez les jeunes médecins et risque de créer de nouveaux problèmes.

Plutôt que la contrainte, c’est l’incitation, l’accompagnement et la valorisation qui permettront d’attirer les jeunes praticiens dans les territoires fragiles.

« Créons les conditions de l’envie, pas celles de la fuite. »


Source Ortus Santé

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