Acteurs Locaux Les deux Savoie – Protégeons nos abeilles et nos apiculteurs
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Article N°29032

Acteurs Locaux Les deux Savoie – Protégeons nos abeilles et nos apiculteurs

Alors que la production de miel 2025 reprend des couleurs, la filière apicole reste fragile : en plus des aléas climatiques et des prédateurs, s’ajoute la menace du Mercosur sur nos apiculteurs.

Le miel est utilisé depuis la nuit des temps. Dans l’Antiquité, il était le principal édulcorant avant l’avènement du sucre. Il servait de conservateur naturel pour les fruits et les viandes, grâce à son faible taux d’eau et à ses propriétés antibactériennes. Les médecins grecs et romains le prescrivaient comme remède contre la toux, les plaies et les troubles digestifs. En cuisine de nos jours, le miel s’invite pour sucrer les desserts, caraméliser les plats sucré-salé, lier les sauces en apportant des arômes inimitables. Ses bienfaits sont aussi reconnus en santé comme agent antitussif, comme antiseptique topique, pour favoriser la cicatrisation, comme source d’énergie rapide grâce à ses sucres simples. Il est employé également dans le domaine de la beauté comme ingrédient hydratant et antioxydant dans les produits cosmétiques.
Le miel est en premier lieu fabriqué par les abeilles et stocké pour leur propre consommation. L’apiculteur ne récolte que le surplus. Lorsque les conditions climatiques ne permettent pas aux abeilles de butiner (printemps pluvieux, étés secs), il est même parfois nécessaire de mettre de l’eau sucrée à disposition des abeilles pour éviter qu’elles ne meurent de faim. S’ajoutent aux aléas climatiques les prédateurs comme les frelons asiatiques ou le varroa qui peuvent décimer des ruches.

En 2023 la France comptait près de 2 millions de ruches pour une récolte de miel de près de 30 000 tonnes. La région Auvergne Rhône Alpes (ARA) arrivait en tête des régions productrices avec 4 286 tonnes produites devançant de peu l’Occitanie et le Grand Est (source Ministère de l’Agriculture).
2024 a vu un effondrement de la production française à 20 000 tonnes en raison de conditions climatiques catastrophiques. ARA a vu une baisse de 47% de sa production à 3130 tonnes, régressant à la troisième position productrice (article Chiffres clés 2024).
2025 voit une nette progression de la production française à 38 300 tonnes, la meilleure année depuis 2014, avec des disparités régionales (article à télécharger sur InterAPI). La région ARA tire bien son épingle du jeu avec une progression à 6820 tonnes, environ 37 kg de miel par ruche.
Alors que nous avons redécouvert les bienfaits du miel, la demande est en croissance depuis le début des années 2000 mais malheureusement ce ne sont pas nos apiculteurs qui profitent de la croissance. La consommation étant de 45 000 tonnes, la France est contrainte d’importer environ 1/3 de ses besoins de l’étranger.

Avec une année 2025 qui retrouve des couleurs, vous pourriez pensez que nous allons consommer français. Ce n’est pas aussi simple que ça. Lorsqu’enfin notre apiculteur a réussi à jongler avec les saisons imprévisibles, à protéger sa ruche des prédateurs et à récolter du miel besogneusement accumulé par les abeilles, celui-ci va être vendu en direct (pour 37%) ou dans un circuit de distribution. Commence alors un autre défi, celui de faire reconnaître la provenance et la qualité de son produit dans un marché inondé de produits de provenances diverses où il est parfois difficile de s’y retrouver.
Prenons le cas de Lune de Miel, Miel de Fleur 100% Pur et Naturel à 4.99 Euros les 500 gr qui affiche fièrement l’histoire d’une famille d’apiculteurs depuis 4 générations qui propose un miel mis en pot dans les Pyrénées depuis 1920. Le terme de « mis en pot » doit inciter à tourner ledit pot dans tous les sens pour comprendre la provenance du miel. C’est sur le couvercle que l’on découvre le pot-aux-roses, la famille pyrénéenne met en pot du miel d’Ukraine et d’Argentine, deux continents dans un seul pot, jolie performance !

C’est la même société, française au demeurant, qui propose Le Miel de l’Apiculteur de Montagne qui indique sur le couvercle l’origine du miel - français et espagnol - de façon plus explicite.
Certains pots sont plus faciles à décrypter, comme Les Apiculteurs Associés dont les miels proviennent de Roumanie, Hongrie en fonction des fleurs. Même le bio sous le label Bio Villages n’échappe pas au mondialisme, lui vient de Bulgarie pour un prix qui ne dépasse pas 5 euros pour 380 gr.
Nos Régions ont du talent fort heureusement proposent du miel récolté en France, mais à plus de 10 euros les 380 grammes. Pareil pour le miel savoyard qui flirte avec les 13euros.

Comment une telle différence de prix est-elle possible ?
C’est que l’Europe qui est dépendante de l’importation pour 40% de sa consommation est ouverte aux miels du monde entier. Au palmarès des pays à qui nous achetons les 33 746 tonnes de miel que nous avons importées en 2024 se trouve l’Ukraine (9 942 tonnes, 29,5%), les pays de l’Union Européenne (UE – 50,7%), des pays asiatiques (Vietnam, Chine) et une multitude d’autres pays.
Un volume significatif de ces miels (contingent) entre dans l’UE sans aucune taxe à la faveur d’accords déjà négociés ou en cours de négociation. Lorsque les volumes importés dépassent ces contingents, des taxes d’environ 17.3% s’appliquent. Ces miels entrent donc sur notre territoire à des prix très bas (3,43 €/kg en moyenne en 2023), et qui s’érodent (3,02 €/kg en 2024). Le miel Ukrainien entrait en France à 1.75 €/kg en 2024 ! (Source : données publiques du commerce extérieur DSECE). Les mesures de sauvegarde qui permettent d’imposer des restrictions temporaires si une importation massive menace le marché interne semblent bien dérisoires. Il y a là un vrai dumping.
Et la situation ne va pas s’améliorer, bien au contraire. Il est à craindre que L’UE ne prévoit des contingents très importants dans le cadre des accords du Mercosur sur le miel et les produits dérivés (cire, propolis) en provenance du Brésil, d’Argentine, du Paraguay, de l’Uruguay et de la Bolivie. (article : Vers un démantèlement significatif de la protection du marché européen du miel à la faveur des accords de libre-échange ?).

Conclusion
« Le miel, c'est la douceur de la nature capturée dans un flacon. » disait Marcel Proust.
Nos apiculteurs capturent cette douceur, ils font tout pour protéger leurs abeilles des conditions climatiques capricieuses et des prédateurs, mais qui les protège eux ?
Confrontés à une concurrence bien souvent déloyale ils voient des miels à bas prix inonder les étals. Ils savent bien que ces miels sont sujets à de multiples fraudes. Une étude réalisée par l’Europe en 2021-2022 a montré que 46%, près de la moitié des miels importés, étaient frauduleux (source Europa). Des sirops de sucre sont ajoutés pour faire baisser artificiellement les prix (adultération), des laboratoires accrédités sont utilisés pour rendre ces mélanges indétectables. Additifs et colorants falsifient l’origine botanique, et la traçabilité est manipulée pour masquer l’origine géographique réelle. Ces pratiques frauduleuses menacent la qualité du miel et la survie des filières locales.
Les entrepôts regorgent de miel français qui ne trouve pas preneur à cause du prix. Nombre de français ne peuvent tout simplement pas se permettre d’en acheter. Pour ceux qui le peuvent c’est un parcours semé d’embûches qui devient un acte militant, mais essentiel pour permettre à nos apiculteurs de survivre. Et si vous offriez du miel français pour Noël ?
Et pour faire frémir vos papilles voici quelques sites qui proposent des recettes à base de miel : https://laplateformedumiel.fr/recette-avec-du-miel/
https://www.secretsdemiel.com/recettes/
 

Nathalie ROC MAWET

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