L'éternité en moins, d'Antigone Trogadis
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Article N°22198

L'éternité en moins, d'Antigone Trogadis

Un beau roman écrit dans une langue superbe...


Je viens d’achever la lecture du beau livre d’Antigone Trogadis : L’éternité en moins. Un beau roman, écrit dans une langue superbe, un français qu’on aimerait lire plus souvent et qu’on ne rencontre que rarement… Un roman à la chronologie pas évidente, à la croisée du journal intime, rédigé par Rosa, Italienne ayant fui Rome pour Athènes, et du récit d’un retour au pays du jeune Manos, Ulysse moderne qui retrouve la capitale grecque, après sept ans d’exil à Montréal (où notre auteur est née). Le journal de Rosa est rédigé grâce au je narratif, qui nous rend bien plus proche et plus émouvant le personnage de Rosa, alors que le retour de Manos est lui tenu à distance par un il narratif. Manos n’en est pas moins soigné. On pressent que ces deux personnages finiront par se rencontrer… Ce beau roman est aussi douloureux : il parle de la Grèce de l’avant prise du pouvoir par les Colonels, un certain 21 avril 1967, et de celle qui, sept ans plus tard, voit la chute de cette criminelle junte et l’instauration si longtemps espérée de la démocratie. Moment dans le roman où Manos redécouvre Athènes et trouve une place dans un journal (qui renvoie à un autre journal, celui de Rosa). Ces deux périodes — avant l’arrivée des tortionnaires qui ont éradiqué toute opposition, surtout communiste, puis après leur chute — plongent le lecteur dans un climat très délétère et inquiétant pour avril 67, et une ambiance toute aussi inquiète, légèrement vacillante, en 74, comme un accidenté réapprend à marcher après sept ans, cloué au lit. L’éternité en moins est donc un roman sur fond politique, dans un pays, la Grèce, qu’on dit avoir inventé la démocratie, mais qui n’a guère été démocratique depuis son indépendance, dont on sent, quand elle le devient, que la liberté retrouvée est et reste fragile… Un roman sur fond politique donc, pas pour autant un roman politique, mais plus un roman sur l’âme de deux pays méditerranéens : l’Italie et la Grèce, vouées à la violence, aux spasmes d’une Histoire profondément tragique, hélas recommencée, un roman qui conclut qu’il ne reste pour toutes armes à Rosa que l’écriture de son Journal, Rosa n’ayant plus la force, écrit-elle dans un très pathétique aveu, « de faire rouler à nouveau le rocher qui finira, de toute manière, par retomber (comme celui de Sisyphe)… Mais pour Rosa, contrairement à lui, l’éternité en moins !

Editions N&B – 189 pages – 18 €

 

Yves CARCHON

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