Lettre ouverte à mes ''amis facebookiens''
France
S'identifier
Changer de territoire
 Menu
ArticlesWebTvAnnuaire
| France | A la une | Alerte enlévement - Disparition  Vu 38353 fois
Article N°19984

Lettre ouverte à mes ''amis facebookiens''

"C'est mon dernier message ici.

Ces deux trois dernières années m'ont donné la chance de rencontrer des gens formidables, et de partager un instant leurs histoires dans la vraie vie.
 
Il y a d'abord eu  les femmes de "femmes et citoyenneté" avec leur amour pour la France et leur douleurs de ne pas être acceptées telles quelles sont. Alors que croyez moi, elles sont sources de richesses humaines.
 
C'est à partir de là que j'ai commencé à m'apercevoir  que je n'étais connectée à la vraie vie qu'à travers mes convictions,  les quelques reportages tournés et choisis et mon ordinateur.
 
Mes convictions ont été bousculées, non le monde n'était pas aussi ouvert que je le pensais.
Les reportages ne reflétaient que ce que je voulais voir
Quant à mon ordinateur, il ne me donnait que ce que je voulais lire.
 
Ma première réaction a été de penser qu'il fallait montrer au monde entier que la différence est une richesse et que si chacun s'ouvre un peu plus, ce serait gagné. Alors je me suis  mise derrière mon ordinateur et j'ai diffusé ma colère devant autant de petitesse d'esprit, devant les "il faut être comme ça ou comme ça", et les "moi je sais".
 
Pleine d'espoir, les gens réagissaient à mes messages. C'était bon signe. Mais j'ai vite déchanté.....
 
Puis sont entrés dans ma vie les jeunes décrocheurs. Je ne devais passer avec eux que 5 séances et j'y suis encore aujourd'hui . Je me suis entendue dire "tu vas voir, tu ne pourras rien en faire, ce sont des cas, inadaptés du système scolaire ils ne s'intéressent à rien"
 
Il y a M., D., M. et A., mineurs isolés qui ont débarqués en France avec leur quelques mots de français, ils ne sont là que depuis quelques mois et attentent tant de ce pays d'accueil. Il y a aussi A., D., D., T. et S. qui ont manqué la marche du lycée et à qui l'on rappelle sans cesse que s'ils en sont là c'est de leur faute.
 
Voyez vous chez ces jeunes, ce qui m'a le plus blessé est qu'ils ne se donnent plus le droit de rêver, ce sont des jeunes que l'on n'écoute pas.
 
Mais quand vous leur donnez la parole, là c'est un feu d'artifice d'idées, d'originalité, un regard aiguisé sur la société et le monde des adultes où ils sont convaincus que leur place est à la cave et surtout qu'ils ne sont pas dignes de réussir.
 
Je pourrais en écrire des pages et des pages mais allez juste à leur rencontre et vous comprendrez.
 
Mais entre temps je suis restée connectée à mon ordinateur et tout ce que je pouvais  y lire, ne correspondait plus à ma vision de la vie, de la liberté et les messages sur les réseaux sociaux devenaient anxiogènes par temps de haine déversée, d'étroitesse de penser,  le toujours plus "c'est moi qui ai raison", l'insatisfaction chronique et l'intolérance générale.
 
J'écrivais sur un mur............
 
Il y a eu aussi ces jeunes collégiens sans perspective d'avenir....
 
Il y a eu aussi Robin,  Lily, Arthur qui ne demandent qu'à être acceptés tels qui sont, pas plus.
 
Et il y a eu son départ qui nous a rapproché car nous nous étions un peu perdu....
 
Si je vous dis tout cela c'est juste pour expliquer que depuis trois ans ma vision de la vie a changé.
 
Je pense que chacun est libre de faire ce qu'il pense être le meilleur pour lui, mais nous sommes tous libres d'accompagner ou non ceux qui ont besoin de nous. Tendre une main juste pour ne pas que l'autre tombe, sans vouloir le conduire sur un chemin qui n'est pas le sien.
 
Arrêtons de rester accrochés à nos préjugés, nos idées préconçues, donnons de l'air à nos idées, réapprenons à vivre ensemble.
 
Mais ce n'est pas ici que cela se passe. Ici nous écrivons sur un mur, on se répond sur mur, on déverse notre colère sur mur, on s'insulte sur un mur, on pose des idées sur un mur et on fait même la révolution sur un mur, on se sent fort sur ce mur, et nous n'agissons pas, car cela reste simplement un mur vertical  sur nos écrans obstruant l'horizon des possibles.
 
Et puis j'ai toujours eu horreur de m'adresser à un mur.
 
Je reprends donc ma citation préférée : "Seuls ceux qui sont assez fous pour penser qu'ils peuvent changer le monde y parviennent" et me donne le droit à rêver à nouveau de m'enrichir des vivants et non plus du virtuel.
 
Je sais que je ne sauverai pas le monde mais si je peux, à ma petite échelle, contribuer à construire quelque chose de positif, alors je ne vais pas m'en priver. Et là dessus j'ai une petite idée qui j'espère va devenir réalité.
 
Vous pourrez lire ici les publications que je partagerai d'ailleurs mais je n'écrirai plus car j'ai enfin retrouvé l'envie de folie, l'envie de bâtir quelque chose, de me sentir à nouveau utile. J'ai envie de partager encore et toujours avec l'image, l'image qui construit, qui valorise qui fait grandir et non celle qui est placardée ici, qui salit, qui divise, qui fait pleurer.
 
C'est donc mon dernier message "facebookien". Rassurez vous, vous ne ressentirez aucun manque de mon absence, son nouvel algorithme va très vite me faire sombrer dans l'oubli de la mémoire virtuelle.
 
Les écrits de certains d'entre vous vont me manquer, votre humour, votre dérision, votre optimisme  mais nous pourrons échanger ailleurs (téléphone, sms, mail, tvlocale et les rencontres dans la vraie vie).
 
Je reviendrai surement de temps en temps sur quelques uns de vos murs pour prendre discrètement de vos nouvelles et je lirai encore pendant quelques temps vos messages sur messenger.
 
Mais je n'écrirai plus sur ce mur.
 
A bientôt, ailleurs qu'ici.
 
Je vous embrasse."

 

Gaelle Laborie

  • 0
    • j'aime
    • Qui aime ça ? »
  • 0
    • je n'aime pas
    • Qui n'aime pas ça ? »
  •  
 

Réagissez, commentez !

  • Aucun commentaire pour l'instant
rechercher un article, une vidéo...
Rechercher un TERRITOIRE ou un BLOG