Aucune terre ne sera mienne, de Sylvie Anahory
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Article N°21020

Aucune terre ne sera mienne, de Sylvie Anahory

Autant dire d’emblée que ce récit est un beau récit, à l’écriture fière, droite, altière, à l’instar du caractère trempé de son héros Paco...

Dans Aucune terre ne sera mienne, Sylvie Anahory a pris sa plus belle plume pour nous compter le destin de Paco, jeune paysan placé au séminaire de Jésuites à Huesca dans les années 1920-1930 en Espagne. Destiné à devenir prêtre, il ne pourra le devenir, autant par manque de vocation que par manque de foi. Quand éclate la Guerre Civile espagnole en 1936, il prend le parti des Républicains contre Franco et s’engage tout entier dans le combat, sachant que le froid, la faim, la mort sont déjà en embuscade. Mais Paco est valeureux, il épouse sa destinée comme d’autres obscurs qui ont fait l’Histoire. Autant dire d’emblée que ce récit (on a quelque mal à l’appeler « roman » même s’il en possède les qualités) — autant dire que ce récit est un beau récit, à l’écriture fière, droite, altière, impeccable en somme, à l’instar du caractère trempé de Paco. Une écriture rude aussi, sans aucune concession, dont l’austérité sert le propos qui n’est pas léger…Des images poétiques, quoiqu’au bord de la rudesse, collant au contexte de l’époque et aux paysages. En lisant le livre, pour une même rigueur dans le récit, j’ai pensé au film Padre Padrone des frères Taviani qui se déroule, lui, en Sardaigne dans un monde aussi fruste... Aucune terre ne sera mienne est un récit solidement construit, reposant sur au moins trois narrations (j’ai cru discerner en filigrane une quatrième qui serait le point de vue de l’auteur ?) - trois narrations donc qui se croisent, s’entrecroisent, l’une rédigée par le je narratif de Paco qui raconte sa geste par le biais de son journal intime, lu à des années de distance par son petit-fils François, petit-fils donnant du coup par sa présence une autre perspective et une profondeur nouvelle au livre. Tout au long de ces mémoires (ou de cette mémoire vivante), Paco nous restitue non seulement son enfance, son parcours, mais aussi ce qu’il voit et vit (c’est, à mon sens, ce qui fait la vraie force du livre) : l’année 1936 en Espagne et les trois années terribles qui suivirent, la guerre fratricide qui ensanglanta le pays et saigna une jeunesse prometteuse, les engagements des jeunes gens de cette génération, la lutte pour la liberté, l’exil jusqu’en France… Sans vraiment le sentir tout au long du récit, on pressent le gros travail sur les faits historiques qu’à dû faire l’auteur en amont de sa propre rédaction. Et, en arrière fond, comme une vague qui revient sans cesse, le fort leitmotiv de l’exil, qui devrait parler à tous et nous parle encore plus intimement aujourd’hui. On l’aura compris : Aucune terre ne sera mienne touche autant au coeur qu’à la mémoire de tous et ne peut laisser personne indifférent. A travers l’étrange et poignant destin de Paco, c’est d’humaine condition dont nous parle Sylvie Anahory. On ne peut que l’en louer !

Editions Cairn, Collection Fiction Sud, 272 pages, 17 euros


 

Yves CARCHON

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