'' Brest Atlantiques 2019 '' Gough Island dans le viseur @Batlantiques @GitanaTeam @trimaranMACIF @Sodebo_Voile @TeamActualeader #Smartrezo


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Article N°23450

'' Brest Atlantiques 2019 '' Gough Island dans le viseur @Batlantiques @GitanaTeam @trimaranMACIF @Sodebo_Voile @TeamActualeader #Smartrezo

Publié le 17.11.2019: Ralenti dans la nuit de samedi à dimanche dans une zone de vents moins forts, le Maxi Edmond de Rothschild a repris de la vitesse dimanche, ce qui lui a permis de recreuser un peu d’écart sur ses poursuivants, dans l’ordre le trimaran MACIF, Sodebo Ultim 3 et Actual Leader. Le leader de « Brest Atlantiques » est attendu la nuit prochaine au niveau de Gough Island, île située à la limite de la zone d’exclusion des glaces, qu’il va laisser à tribord avant d’attaquer une série d’empannages le long de cette « ZEG ».

Si la mer s’est un peu assagie ce dimanche par rapport à vendredi et samedi, les messages envoyés ce dimanche par les media men, qui ont pu enfin taper des mots sur le clavier de leurs ordinateurs, témoignent de la rudesse des conditions que les quatre trimarans de « Brest Atlantiques » ont endurées pendant 48 heures. « Voilà quelques jours que le simple fait de se pencher sur un clavier pour vous écrire ces quelques lignes paraissait inenvisageable. L’unique challenge de rester accoudé face à un ordinateur alors que le bateau essaie de battre le record de saut en hauteur au milieu de l’Atlantique Sud était physiquement impossible à réaliser pour moi »explique ainsi Martin Keruzoré, sur Sodebo Ultim.

Avant d’ajouter, à propos de l’état d’esprit des skippers Thomas Coville et Jean-Luc Nélias : « Après ces trois jours d’enfer, ils sont ce matin cachés sous des cagoules, les traits tirés, la mine des mauvais jours, les yeux abîmés de fatigue. Le Sud avec le rythme de sa houle a dicté la vie à bord, à savoir des phrases courtes, beaucoup d’intonations et d’exclamations, au plus loin de la belle poésie. »


Son de cloche similaire pour Yann Riou, le media man du Maxi Edmond de Rothschild : « Ce soir, on devrait arriver à la porte des glaces. Ça ne sonne pas très engageant dit comme ça... Pourtant, ça signifie aussi qu’on en aura fini avec ce fichu bord de reaching ! Trois jours qu’on progresse face à la mer dans du vent soutenu. Alors oui, c’est devenu un peu moins pénible qu’en quittant Rio, mais il n’empêche, c’est compliqué. C’est compliqué de trouver le bon compromis pour aller vite sans risquer d’abîmer le bateau. C’est compliqué de trouver le sommeil entre deux sauts de vagues. Et c’est compliqué d’écrire ce message avec un clavier qui a du mal à bien vouloir rester campé sur mes genoux. Donc oui, on aura peut-être un peu froid, mais on est plutôt contents d’y arriver, dans ces fameux quarantièmes... »

Effectivement, c’est la nuit prochaine que le Maxi Edmond de Rothschild, après avoir laissé en fin de journée les îles Tristan da Cunha à bâbord, est attendu au niveau de Gough Island, île située en plein milieu de l’Atlantique Sud, à la limite nord de la zone d’exclusion des glaces (« ZEG »), dans laquelle les trimarans ont interdiction de pénétrer. Ralentis la nuit dernière dans une zone moins ventée, Franck Cammas et Charles Caudrelier ont depuis profité d’une mer moins « casse-bateau » pour allonger la foulée, flashés à 33.4 nœuds de moyenne entre les classements de 12h et 16h ! Ce qui leur a permis de retendre l’élastique avec leurs poursuivants, le trimaran MACIF (François Gabart/Gwénolé Gahinet) étant pointé à 16h à 103 milles (contre 51 huit heures plus tôt), Sodebo Ultim 3 à 223, Actual Leader (Yves Le Blevec/Alex Pella) à 340, dont la bâche aéro située derrière la poutre avant s'est déchirée dans une vague (voir le témoignage de Ronan Gladu).

Arrivés à Gough Island, qu’ils laisseront à tribord, les bateaux de tête vont alors se glisser sous un anticyclone dans du vent d’ouest qui va les obliger à multiplier les empannages le long de la « ZEG », tandis que derrière eux, Actual Leader devrait bénéficier d’une remontée progressive de cet anticyclone pour faire une route plus directe vers Le Cap, où les quatre trimarans sont attendus en une quinzaine d’heures à partir de la nuit de mercredi à jeudi.

Photo : Yann Riou/PolaRyse/Gitana SA

 

Voici le mot du bord envoyé de dimanche 17 novembre par Ronan Gladu, media man à bord d'Actual Leader.

"La vie est toujours dure sur Actual Leader, alors que nous entamons ce troisième jour (ou quatrième ? Je ne sais plus !) à nous battre avec cette tempête en Atlantique sud. Depuis Rio, nous n'avons pas vu le soleil, il pleut et il fait de plus en plus froid à mesure que l'on plonge dans le sud. Nous ne sommes plus au près, la mer est toujours pourrie, mais de manière moins fréquente : le bateau accélère sur les portions « plates » pour une sanction deux fois pire à la première double vague qui gonfle : encore plus violent et flippant !

Du coup, à force de maltraiter le trimaran, la casse arrive : hier samedi à la tombée de la nuit, la « bâche aéro » s’est arrachée dans une vague. En dessous et une partie seulement, au vent et sur bâbord. Qu’est-ce que c’est que ce truc ? C’est le carénage situé derrière la poutre avant, pour un meilleur écoulement de l’air, qui tient également… tout le filet !! Si la bâche lâche, c’est tout le « trampoline » bâbord qui part à l’eau : catastrophique. Yves et Alex se sont battus jusqu’à la nuit pour stopper l’hémorragie. Pour l’instant, ça tient. Mais il faut absolument envisager une vraie réparation, seulement là, la mer est démontée… Et il y a une autre urgence : le front de la tempête se rapproche dangereusement derrière nous !

La réparation de fortune nous a mis dans une situation délicate : d’après notre routeur, le front n’est plus qu’à 30 milles et il avance vers nous à une vitesse indéterminée (de 20 à 35 noeuds en gros). S'il nous rattrape, le vent va adonner et faiblir… Et on se retrouvera derrière, sans vent, avec la mer démontée : la course sera finie. Il faut que l'on arrive à se faire pousser dans l’anticyclone qui est devant, avec les autres. Pour ça, on doit rester en avant jusqu’à lundi matin.

Mais la pluie redouble d’intensité, le vent commence à faiblir, et tourner nord-ouest : c’est la cata, il arrive ! Branle-bas de combat à bord : on enlève un ris ? Non, on envoi le J2 ! Et c’est parti pour une course folle avec les nuages qui va durer presque toute la nuit. Alex me briefe, une main sur chaque écoute : Tu vois, ça, c’est la direction du vent : en-dessous de 10°, on est mort. En-dessous de 20 nœuds de vent, c’est cuit aussi ! L'anémomètre évolue en permanence, jusqu’à un vent plus bas de 14 noeuds au 345°… Yves grogne, Alex se cache les yeux pour ne pas voir les chiffres, « ça peut être encore un grain devant le front, si c’est le cas, ça va repartir fort, faites attention ».

Paf, d’un coup le vent monte à 25-28 noeuds au 15°, le trimaran vrombit, s’envole à l’abattée (il passe de 18 à 30, 35 noeuds de vitesse !)… Impossible de tenir debout, nos cœurs font des bonds pendant qu’Alex choque tout ce qu’il peut, tout en essayant de ne pas se faire embarquer par l’écoute et les mouvements du bateau. Tout ça sur fond sonore de vent, pluie battante, sifflement, craquement du carbone et hurlement des bouts qui dérapent sur les winchs !!

C’est chaud, mais au moins, on est devant, jusqu’à la prochaine molle ! Moi, je suis littéralement jaune de trouille, le palpitant à 100 mille. Je finis par aller me réfugier dans ma bannette : littéralement cramponné au carbone à chaque accélération, le bateau finit par sauter sur une vague. Silence et haut le cœur, puis fracas terrible à la réception - le corps s’enfonce dans le pouf - pour finir par le « coup de fouet ». Effet caractéristique des multicoques en carbone, le peu de déformation de la plateforme se transmet sous forme d’onde de choc dans le bateau, dans nos corps. Un peu comme un tremblement de terre. Bref, je n'ai évidemment pas dormi de la nuit et j’ai des crampes partout, à force d’être crispé à chaque départ enflammé !

Yves & Alex n'ont bien sûr pas dormi. Après un « beau planté », ils ont réduit le J3 et continué à accélérer avec la moindre risée… Mais ils l’ont fait !! Apparemment, nous avons la deuxième vitesse moyenne la plus rapide de la flotte cette nuit, mème si c’était avec les nuages que l'on se battait ! Là, nous fusons littéralement à plus de 30 noeuds dans une mer un peu plus rangée mais avec de belles rampes, qui me permettent encore de voler au plafond en écrivant ces lignes ! On est toujours en mode #VieDesbetes, nous avons sorti nos sous-combinaisons en Gore-tex pour tenter de chasser l’humidité du ciré… et du bateau : il y a de l’eau partout au fond de la coque. Ça fait deux jours que je ne mange pas, je n'ai pas envie de voler à travers le bateau une fois sur « le trône » ! Mais j’ai enfin pris le pli de pisser au milieu du cockpit et des discussions… #VieDesBetes. Ce soir, le vent forcit, « 30 noeuds fichier », j’espère qu’Yves et Alex vont s’accorder sur un troisième ris !"

Photo : Ronan Gladu/Actual Leader

 

Voici le mot du bord envoyé ce dimanche 17 novembre par Martin Keruzoré, media man sur Sodebo Ultim 3.

"Voilà quelques jours que le simple fait de se pencher sur un clavier pour vous écrire ses quelques lignes paraissait inenvisageable. Non pas que l’envie de vous faire part de ce que nous traversons à bord ne soit pas là, mais l’unique challenge de rester accoudé face à un ordinateur alors que le bateau essaie de battre le record de saut en hauteur au milieu de l’Atlantique Sud était physiquement impossible à réaliser pour moi.

Par où commencer cette carte postale....

A voir leurs visages après ces trois jours de mer d’enfer, ils sont ce matin cachés sous des cagoules, les traits tirés, la mine des mauvais jours, les yeux abîmés de fatigue. Le Sud avec le rythme de sa houle a dicté la vie à bord, à savoir des phrases courtes, beaucoup d’intonations et d’exclamations, au plus loin de la belle poésie. Périodiquement, réglé chaque minute, après s’être élancés à vive allure par vent de travers sur un grand tremplin bleu déferlant blanc, nous nous retrouvons suspendus, dans le silence, en plein vol, ou plutôt en chute libre. Tout s’arrête, le moment pourrait être magique, en apesanteur à 4 mètres au-dessus d’un océan déchaîné, cela pourrait l’être si le traumatisme de la dernière chute n’était pas ancré en nous. On redescend, ça va taper, un grand coup, par réflexe le corps se gaine, c’est long, on attend, impact imminent. Un bruit sec de destruction raisonne, ça rentre en vibration jusqu’au plus profond de nous, le corps et le bateau ont mal. L’impression de retomber sur une mer d’acier, un choc entre deux éléments solides, que tout oppose.

Dans la cellule ou nous vivons depuis près de deux semaines, c’est le chaos. Les casiers contenant à la base nos affaires et notre nourriture sont éventrés, le sol est tapissé d’objets en tous genres, une orange qui roule sous le vent, une chaussette qui joue les éponges, une glacière qui sert de caisse à outils. Que pouvons-nous faire en attendant la prochaine vague, la prochaine punition, qui ne cesse de nous être infligée jours et nuits depuis que nous avons quitté Rio ? On va patienter, continuer à faire marcher le bateau, continuer à manger, vivre, (on rangera après, promis...) en espérant voir rapidement le bout de tunnel pour y faire les comptes."

Photo : Martin Keruzoré/Sodebo Ultim 3

 

Voici le mot du bord envoyé ce dimanche 17 novembre par Yann Riou, media man sur le Maxi Edmond de Rothschild.



« Ce soir on devrait arriver à la porte des glaces. Ça ne sonne pas très engageant dit comme ça... Pourtant, ça signifie aussi qu’on en aura fini avec ce fichu bord de reaching ! Trois jours qu’on progresse face à la mer dans du vent soutenu. Alors oui, c’est devenu un peu moins pénible qu’en quittant Rio, mais il n’empêche, c’est compliqué. C’est compliqué de trouver le bon compromis pour aller vite sans risquer d’abîmer le bateau. C’est compliqué de trouver le sommeil entre deux sauts de vagues. Et c’est compliqué d’écrire ce message avec un clavier qui a du mal à bien vouloir rester campé sur mes genoux. Donc oui, on aura peut-être un peu froid, mais on est plutôt contents d’y arriver, dans ces fameux quarantièmes... »

Photo : Yann Riou/PolaRyse/Gitana SA





 

La nuit de samedi à dimanche a été profitable au trimaran MACIF (François Gabart/Gwénolé Gahinet) qui a réduit de moitié l’écart le séparant du leader, le Maxi Edmond de Rothschild (Franck Cammas/Charles Caudrelier), freiné dans une zone de vents moins forts qui s’est évacuée au passage de ses concurrents. A 8h ce dimanche, ce dernier possède 51 milles d’avance sur son poursuivant immédiat, tandis que Sodebo Ultim 3 (Thomas Coville/Jean-Luc Nélias) pointe à 192 milles, Actual Leader (Yves Le Blevec/Alex Pella) à 315.

A bord du Maxi Edmond de Rothschild, Charles Caudrelier évoquait samedi, dans une vidéo envoyée par le media man Yann Riou ,la difficulté de trouver le bon compromis entre vitesse et préservation du matériel dans les conditions difficiles que rencontre la flotte depuis Rio : « Il y a du vent, mais surtout une très mauvaise mer, les bateaux souffrent, c’est dur de savoir où placer le curseur. On est sur le frein, on essaie de se caler sur la vitesse de MACIF, sans trop en faire. Le bateau peut aller beaucoup plus vite mais la mer n’est pas bonne, la difficulté, c’est d’aller vite sans rien casser sur trente jours, ce n’est pas évident. »

La journée de dimanche s’annonce assez rapide pour les quatre trimarans qui descendent toujours au près/travers dans un vent de nord-est d’une vingtaine de nœuds, faiblissant à l’approche de Gough Island, île située au milieu de l’Atlantique Sud et à la limite nord de la zone interdite des glaces, qu’ils vont laisser à tribord la nuit prochaine. Ils devraient alors être ralentis au sud d’un anticyclone qui va peu à peu remonter, offrant l’opportunité à Actual Leader de faire une route plus directe vers Le Cap, où les premiers sont attendus dans la nuit de mercredi à jeudi prochains, Actual Leader dans la journée de jeudi. Les derniers routages donnant une quinzaine d’heures entre ce dernier et le passage du leader, le Maxi Edmond de Rothschild.

Photo : Ronan Gladu/Actual Leader


 

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